Fiche descriptive : Bioremédiation anaérobie – in situ

De : Services publics et Approvisionnement Canada

Sur cette page

Description

La bioremédiation anaérobie est une technique de restauration in situ utilisée pour le traitement des sols ou des eaux souterraines contaminés par des hydrocarbures pétroliers ou par d'autres composés organiques en conditions saturées.

Cette technique consiste à fournir les composés nécessaires (par exemple : accepteur d'électrons, nutriments, substrat, etc.) aux bactéries indigènes anaérobies (strictes ou facultatives) du sol ou de l'eau souterraine afin d'accélérer la biodégradation des contaminants. Les bactéries anaérobies strictes ne peuvent pas utiliser l'oxygène comme accepteur final d'électrons et ont donc recours à des accepteurs d'électrons alternatifs tels que le nitrate (NO3), le manganèse dissous (Mn4+), le fer ferrique (Fe3+), les sulfates (SO42 –) et le dioxyde de carbone (CO2). Les accepteurs d'électrons alternatifs sont plus solubles dans l'eau que l'oxygène et peuvent être injectés plus facilement sous forme dissoute. Les nutriments peuvent être injectés sous forme liquide (tels que des fertilisants solubles commerciaux) ou gazeuse selon le cas. L'ajout d'un substrat permet, dans certains cas, la réduction des concentrations en oxygène et donc la mise en place d'un environnement favorable à la biodégradation anaérobie.

La bioremédiation anaérobique est largement utilisée pour la remédiation de sites contaminés par des solvants chlorés. Toutefois, cette fiche ne traite pas de la biodégradation anaérobique des composés chlorés puisqu’elle est abordée dans la fiche « Déchloration réductive ».

En plus des composés chlorés, le traitement in situ par biostimulation anaérobie a été éprouvé pour plusieurs contaminants, dont certains hydrocarbures pétroliers, l’ammonium, les nitrates, les sulfates, les pesticides et les explosifs. Selon le contaminant et la géochimie du milieu affecté, différents composés peuvent être ajoutés au média contaminé, tels que de l’huile de grade alimentaire, des fertilisants, une source d’hydrogène ou de nitrates, etc.

Liens Internet :

Mise en œuvre de la technologie

La mise en œuvre de projets de bioremédiation anaérobie peut inclure :

  • Des essais en laboratoire ou à l’échelle pilote;
  • L'ajout de réactifs pouvant nécessiter des mesures comme :
    • L'installation de puits/pointes d’injection
    • La construction de tranchées ou de drains d’infiltration
    • L'injection ou l'infiltration de solutions aqueuses de traitement
    • L'injection de boues liquides
    • L'injection de gaz en dessous de la nappe phréatique
    • Le mélange en sol profond avec des réactifs solides ou en suspension
    • L’addition d’un amendement à de l’eau souterraine pompée, puis réinjectée
  • La réalisation d’un programme de suivi;
  • Le démantèlement du matériel d'injection.

Les contaminants sont détruits ou transformés par l’action microbienne et le traitement est complété lorsque les concentrations de contaminants atteignent les objectifs de traitement.

Les principaux enjeux de la bioremédiation anaérobie incluent la distribution des composés nécessaires au traitement dans le média souterrain et le maintien d’un environnement adéquat à la croissance des bactéries.

Matériaux et entreposage

  • Les procédures d'entreposage sur le site sont reliées aux types d’amendements et aux procédés d’injection utilisés.
  • Les réactifs injectés varient considérablement en fonction des contaminants, de la composition des eaux souterraines et du spécialiste responsable. Divers mélanges, brevetés ou non, sont couramment utilisés, tels que le lactate, la mélasse, l’acétate, le méthanol, l’éthanol, de l’huile végétale, des composés à relâchement progressif d’hydrogène, du compost, etc.
  • Les projets avec injections périodiques devraient éviter l'entreposage sur le site en apportant seulement les matériaux au fur et à mesure des besoins.
  • L'injection de nitrates comme accepteurs d'électrons peut poser un problème puisque ce composé est soumis à la réglementation.

Résidus et rejets

  • Lorsque le traitement est réussi, le principal résidu est la biomasse microbienne (qui se décompose au fil du temps).
  • L’excès d'agent réactif ne peut habituellement pas être récupéré. Il est généralement consommé sur place.
  • L’installation du système de traitement nécessite généralement des travaux de forage ou d’excavation dans les zones contaminées, entraînant la manipulation et l’élimination de sols contaminés, généralement placés dans des conteneurs et éliminés hors site.
  • L’eau souterraine traitée peut transporter des microorganismes, des amendements et des sous-produits de dégradation hors de la zone de traitement. Un contrôle hydraulique peut s’avérer nécessaire.

Analyses recommandées dans le cadre d’une caractérisation détaillée

Analyses biologiques

  • Le dénombrement de la population bactérienne hétérotrophe totale et de la population bactérienne spécifique (selon le ou les contaminants d’intérêt)

Analyses chimiques

  • pH
  • Le potentiel d'oxydoréduction (Eh)
  • Le contenu en carbone organique
  • La teneur en matière organique
  • La concentration des métaux
  • La concentration des contaminants présents dans les phases :
    • adsorbées
    • dissoutes
    • libres
  • La concentration des nutriments incluant :
    • l'azote ammoniacal
    • l'azote total Kjeldahl
    • les nitrates
    • les nitrites
    • le phosphore total
  • La concentration des accepteurs d'électrons/sous-produits de réaction suivants :
    • l'oxygène dissous
    • le nitrate
    • les sulfates
    • le fer ferrique et ferreux
    • le méthane
    • le manganèse dissous

Analyses physiques

  • La concentration en oxygène dissous
  • La concentration en méthane
  • La température
  • L'analyse granulométrique
  • L'évaluation biologiques et des facteurs écologiques

Essais recommandés dans le cadre d’une caractérisation détaillée

Essais biologiques

  • Essai de minéralisation en microcosmes

Essais hydrogéologiques

  • Essais avec traceur

Remarque : Des essais sur le terrain pour mesurer la conductivité hydraulique au niveau de la barrière gelée ainsi que le rayon d'influence des tubes frigorifiques sont nécessaires avant de procéder à l'installation d'une barrière gelée.

Autre information recommandée pour une caractérisation détaillée

Phase II

  • La profondeur et l'étendue de la contamination
  • La présence de récepteurs :
    • la présence de récepteurs potentiels
    • la présence d'infrastructures de surface et souterraines
    • le risque de migration hors site

Phase III

  • La stratigraphie du sol
  • La détermination des voies préférentielles de migration des contaminants
  • Une modélisation hydrogéologique
  • La connaissance détaillée de la géologie et de l'hydrogéologie incluant :
    • la direction d'écoulement des eaux souterraines
    • la conductivité hydraulique
    • les fluctuations saisonnières
    • le gradient hydraulique

Applications

  • Permet de traiter la contamination résiduelle située dans la zone saturée ainsi que la contamination dissoute dans l'eau souterraine;
  • S'applique aux contaminants qui peuvent être dégradés ou transformés, en condition anaérobie (absence d'oxygène) ou en anoxie (pauvre en oxygène).
  • Les sols doivent être suffisamment perméables pour permettre l'injection d'accepteurs d'électrons et d'autres substances en solution aqueuse.

Applications aux sites en milieu nordique

La bioremédiation anaérobie in situ est potentiellement applicable dans certaines régions éloignées où il est possible de surmonter les obstacles liés au transport des matières et à la mobilisation de matériel d’injection. Le froid peut nuire à la biodégradation puisque la population bactérienne peut être active seulement durant les mois d’été, par conséquent le traitement peut prendre plusieurs années. L’activité microbienne tout au long de l’année est possible plus en profondeur (en dessous du pergélisol) puisque la température y demeure relativement constante.

Type de traitement

Type de traitement
Type de traitementS’applique ou Ne s’applique pas
In situ
S’applique
Ex situ
Ne s’applique pas
Biologique
S’applique
Chimique
Ne s’applique pas
Contamination dissoute
S’applique
Contamination résiduelle
S’applique
Contrôle
Ne s’applique pas
Phase libre
Ne s’applique pas
Physique
Ne s’applique pas
Résorption
S’applique
Thermique
Ne s’applique pas

État de la technologie

État de la technologie
État de la technologieExiste ou N'existe pas
Démonstration
Existe
Commercialisation
Existe

Contaminants ciblés

Contaminants ciblés
Contaminants ciblésS'applique, Ne s'applique pas ou Avec restrictions
Biphényles polychlorés
Ne s'applique pas
Chlorobenzène
Ne s'applique pas
Composés inorganiques non métalliques
Avec restrictions
Composés phénoliques
Ne s'applique pas
Explosifs
Avec restrictions
Hydrocarbures aliphatiques chlorés
Ne s'applique pas
Hydrocarbures aromatiques monocycliques
S'applique
Hydrocarbures aromatiques polycycliques
Avec restrictions
Hydrocarbures pétroliers
Avec restrictions
Métaux
Ne s'applique pas
Pesticides
Avec restrictions

Durée du traitement

Durée du traitement
Durée du traitementS’applique ou Ne s’applique pas
Moins de 1 an
Ne s’applique pas
1 à 3 ans
S’applique
3 à 5 ans
S’applique
Plus de 5 ans
S’applique

Considérations à long terme (à la suite des travaux d'assainissement)

Un suivi de la qualité des eaux souterraines pourrait être nécessaire afin de s'assurer du respect des objectifs de réhabilitation et des critères et normes applicables lors du retour à l’équilibre de l’aquifère suivant l’arrêt du traitement et la décomposition de la biomasse.

Produits secondaires ou métabolites

  • La formation de sous-produits de réaction peut être une préoccupation importante. Des intermédiaires toxiques peuvent être produits lors de la dégradation de certains explosifs et pesticides. Des essais de laboratoire ou des essais pilotes, ainsi qu’un contrôle strict de la qualité des matières injectées sont généralement requis.

Limitations et effets indésirables de la technologie

  • La perméabilité des sols peut limiter l'application de cette technologie;
  • Les matrices de sols fracturés, compactés, hydrophobiques et/ou hétérogènes peuvent créer des chemins préférentiels et rendre difficile l'injection de façon homogène;
  • Une concentration trop élevée de contaminants peut inhiber la biodégradation;
  • Une concentration importante en métaux peut inhiber la biodégradation;
  • Le pH des sols doit idéalement se situer entre 6 et 8;
  • Le taux de biodégradation de la majorité des composés organiques est plus lent en condition anaérobie qu'en condition aérobie;
  • Les mécanismes de biodégradation anaérobie et le suivi du traitement associé sont plus complexes par rapport à la biodégradation aérobie;
  • La bioremédiation anaérobie a un impact important sur certains paramètres comme le potentiel d’oxydoréduction, le pH et le carbone organique total.
  • En cas d’accident ou de défaillances dans les zones de traitement, de l’eau souterraine contaminée non traitée peut migrer en dehors de ces zones.

Technologies complémentaires améliorant l’efficacité du traitement

  • L'injection combinée d'oxygène et de nitrate peut induire la biodégradation en conditions microaérophilie (environ 2 % à 10 % d’oxygène), ce qui peut être avantageux pour certains contaminants;
  • La bioaugmentation.

Traitements secondaires requis

  • Il n'y a pas de technologie secondaire requise

Exemples d'application

Les liens suivants montrent des exemples d'application :

Performance

Le temps nécessaire à la restauration d'un site par bioremédiation in situ anaérobie est très variable et est fonction à la fois du type et de la concentration du ou des contaminants, de la population bactérienne indigène et des propriétés physico-chimiques du milieu.

Mesures pour améliorer la durabilité de la technologie et/ou favoriser l’assainissement écologique

  • Optimisation du calendrier afin de favoriser le partage des ressources et réduire le nombre de jours de mobilisation.
  • Utilisation d'énergie renouvelable et d’équipement à faible consommation d’énergie (par exemple, énergie géothermique ou solaire pour la distribution des amendements).
  • Utilisation d’amendements requérant moins d'énergie pour leur production.
  • Utilisation d’amendements fabriqués localement et de fournisseurs locaux.
  • Recirculer l’eau souterraine afin de maximiser l'utilisation des amendements et diminuer le nombre de puits d'injection.
  • Utilisation de sources d’eau alternatives pour diluer les amendements/nutriments à injecter.
  • Utilisation de contenants de solution en vrac recyclables.

Impacts potentiels de l'application de la technologie sur la santé humaine

  • Non disponible pour cette fiche

Références

Auteur et mise à jour

Fiche rédigée par : Karine Drouin, M.Sc., Conseil national de recherches

Mise à jour par : Karine Drouin, M.Sc., Conseil national de recherches

Date de mise à jour : 1 avril 2008

Dernière mise à jour par : Marianne Brien, P.Eng., Christian Gosselin, P.Eng., M.Eng., Golder Associés Ltée

Date de mise à jour : 22 mars 2019

Version :
1.2.4