Fiche descriptive : Biodégradation — Sédiments

De : Services publics et Approvisionnement Canada

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Description

La biodégradation est un processus par lequel des contaminants organiques présents dans des matrices solides ou liquides sont transformés par des microorganismes pour produire du matériel cellulaire, de l’énergie, des composés organiques (généralement moins toxiques que les composés parents), du CO2 et de l’eau. Dans des conditions favorables, les microorganismes sont capables de dégrader un vaste éventail de composés organiques. La biodégradation du pétrole et des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) (Ukiwe et al. 2013) dans les sédiments a été clairement démontrée, mais la biodégradation des biphényles polychlorés (BPC) et des hydrocarbures aliphatiques chlorés (HAC) s’appuie, pour l’instant, sur une technologie émergente. Le principal avantage de la biodégradation est la persistance de réactions biologiques qui peuvent mener à une transformation complète ou à une minéralisation de contaminants organiques qui prennent ainsi des formes moins toxiques ou non toxiques. Il s’agit également d’une méthode en vertu de laquelle le coût par unité de volume traité se compare favorablement avec celui associé à des technologies ex situ et d’autres technologies in situ.

La biodégradation peut se produire dans des conditions aérobie ou anaérobie. Elle se produit de façon relativement facile pour la plupart des hydrocarbures pétroliers, les HAP (notamment les HAP affichant un faible poids moléculaire), les BPC et un petit nombre d’HAC (dichloroéthane, chloroéthène) dans des conditions aérobie. Si l’oxygène ne se renouvelle pas facilement, comme c’est habituellement le cas dans les sédiments, la diminution rapide des concentrations d’oxygène dissous due à la respiration microbienne crée des conditions anaérobie. Dans de tels cas, des microorganismes anaérobie peuvent utiliser des accepteurs d’électrons autres que l’oxygène, comme les nitrates, les sulfates, le manganèse (Mn) (IV), le fer (Fe) (III) ou le CO2 pour continuer la minéralisation des contaminants. Les composés chlorés complexes sont plus faciles à biodégrader dans des conditions anaérobie. Les hydrocarbures pétroliers, les HAP légers et les BPC, de même que les HAC, peuvent être dégradés dans des conditions anaérobie lorsque des accepteurs d’électrons autres que l’oxygène sont disponibles pour les microorganismes.

Généralement, on utilise deux méthodes pour promouvoir le traitement biologique des sédiments contaminés : la biostimulation et la bioaugmentation.

La biostimulation est l’introduction d’additifs (amendements) dans les sédiments de manière à stimuler les microorganismes indigènes et à accélérer la biodégradation de contaminants particuliers (par exemple par l’oxydation ou l’ajout d’éléments nutritifs). La biostimulation peut se produire dans les deux types d’environnements, aérobie et anaérobie, pourvu que les conditions propices à la vie microbienne soient présentes. Il est souvent avantageux de se concentrer sur la biostimulation dans des conditions, soit aérobie, soit anaérobie. Les conditions environnementales de prédilection dépendent du potentiel de biodégradation des contaminants, de l’accès à des biostimulants et des conditions présentes du site.

La bioaugmentation repose sur l’introduction, directement ou dans les sédiments contaminés, de microorganismes de culture affichant des capacités catabolitiques particulières. Cette procédure permet ou accélère la biodégradation de contaminants cibles. Le facteur clé du succès de la bioaugmentation est le choix de la souche bactérienne appropriée. Ce choix doit être fait en tenant compte non seulement de la capacité de la souche à dégrader les contaminants préoccupants, mais aussi de la capacité de la souche à survivre dans les conditions environnementales du nouvel habitat (p. ex. pH, salinité, potentiel hydrogène). Il convient de noter qu’en situation réelle, l’efficacité de la bioaugmentation n’a pas été démontrée de façon concluante. Cette technologie en est encore au stade expérimental, et on est confronté à des problèmes importants dans l’application aux environnements sous-marins à grande échelle. Au Canada, l’injection de microorganismes dans l’environnement est réglementée par une agence fédérale et les dispositions de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement de 1999 (LCPE 1999) doivent être respectées. Si on veut envisager leur utilisation pour la technique d’assainissement de la bioaugmentation, les microorganismes doivent être inscrits sur la liste intérieure des substances.

Liens internet

EPA des États-Unis, 1993 Guide for Conducting Treatability Studies under CERCLA: Biodegradation Remedy Selection.

https://semspub.epa.gov/work/HQ/175669.pdf

Mise en œuvre de la technologie

Les techniques de biodégradation sont fortement tributaires du site, et le choix d’une démarche exige que l’on prenne en considération le type de contaminant, la répartition de la taille des grains des sédiments, les conditions environnementales naturelles (p. ex. les conditions anaérobie ou aérobie), l’accès au site et son emplacement. Les principaux enjeux de la mise en œuvre des techniques d’assainissement par la biodégradation sont leur application et la répartition des milieux de traitement (amendements) au sein de la zone contaminée. La mise en œuvre inclut l’atteinte d’une couverture de surface adéquate, la réduction de la perte des amendements par la suspension et le traitement des contaminants à la profondeur voulue. Le processus de choix et de mise en œuvre d’une technique de biodégradation sur un site peut comprendre les étapes suivantes :

  • Identification des microorganismes indigènes qui sont présents sur place et établissement de leur capacité à dégrader les contaminants préoccupants. Si les organismes indigènes sont capables d’optimiser le taux de biodégradation, la biostimulation peut être une option efficace de traitement. Lorsque les organismes indigènes ne sont pas capables de biodégrader les contaminants, mais que le site offre toutes les conditions nécessaires à la survie microbienne (p. ex. pH, salinité, potentiel hydrogène), la bioaugmentation peut être une option efficace de traitement.
  • Il convient de réaliser une analyse détaillée des conditions du site, y compris la caractérisation des conditions microbiennes et environnementales, comme la température, le pH, les éléments nutritifs disponibles et la teneur en oxygène dissous.
  • On peut déterminer si des modifications peuvent être apportées au site pour améliorer le rendement microbien, sans que cela s’accompagne d’effets néfastes sur les organismes benthiques indigènes. Si des modifications sont réalisables et ne sont pas susceptibles de toucher la communauté benthique (ou si les effets négatifs peuvent être facilement atténués), la voie de la biodégradation pourrait être une option viable.

Biostimulation

  • En utilisant les connaissances sur la communauté microbienne existante et les conditions environnementales du site, il convient d’établir les déficiences dans les conditions du site et la voie optimale de la biodégradation pour un rendement optimal des microbes.
  • Décider quelle souche bactérienne il convient d’optimiser et obtenir les amendements (p. ex. les éléments nutritifs) qui sont nécessaires pour améliorer le rendement microbien.
  • Effectuer un essai pilote sur place en utilisant différentes doses d’amendements pour produire une estimation exacte des quantités d’amendements requises, des techniques d’application et des calendriers de l’assainissement requis pour atteindre les objectifs de l’assainissement.
  • Appliquer les amendements aux sédiments contaminés en se fondant sur leur épaisseur et les techniques d’application relevées au cours des essais pilotes. Selon les conditions du site et la phase des amendements (c.-à-d. solide, liquide ou gazeuse), l’application peut prendre les formes suivantes :
    • Les amendements peuvent être placés à la surface de l’eau (comme pour une couche de couverture de sable, détaillée dans le feuillet d’information Recouvrement-Sédiment) et couler vers la surface des sédiments. On peut utiliser une drague mécanique à benne preneuse pour les amendements solides et un pulvérisateur de liquides pour les amendements liquides.
    • Déposer les amendements sous la surface de l’eau, directement au-dessus des sédiments. Cela réduira la remise en suspension et la perte d’amendements du fait du débit dans l’étendue d’eau et améliorera la précision des applications d’amendements pour les sédiments qui se trouvent à une profondeur importante. L’application peut être effectuée en utilisant une drague mécanique à benne preneuse pour les amendements solides, ou une pompe hydraulique pour les amendements liquides (voir le feuillet d’information Recouvrement – Sédiments pour obtenir de plus amples renseignements sur l’application).
    • Il convient d’injecter les amendements directement dans les sédiments afin de réduire les occurrences de remise en suspension et la perte d’amendements du fait du débit dans l’étendue d’eau. L’injection directe permet un traitement efficace de la contamination de subsurface et le traitement des « points sensibles » ciblés (p. ex. emplacements précis affichant une contamination élevée).
    • Surveiller la dispersion des amendements pour veiller à ce qu’il y ait une application suffisante dans la zone contaminée.
    • Mettre en œuvre un plan de surveillance à long terme afin de progresser vers les buts de l’assainissement au fil du temps.

Bioaugmentation

  • Identifier les microorganismes potentiels capables de dégrader biologiquement le contaminant cible et relever les nécessités environnementales à prendre en compte pour optimiser le rendement microbien.
  • Choisir et obtenir la souche bactérienne capable à la fois de biodégrader le contaminant préoccupant et de survivre dans le milieu actuel du site.
  • Réaliser un essai pilote sur place, en utilisant un éventail de doses bactériennes, pour établir la quantité requise et la technique d’application susceptible d’optimiser le taux de biodégradation.
  • Appliquer les colonies de bactéries aux sédiments contaminés d’après le mode optimal dérivé des essais pilotes. Comme l’efficacité de la bioaugmentation n’a pas été démontrée de façon concluante, les techniques d’application doivent encore être mises au point pour cette méthode d’assainissement.
  • Il convient de surveiller la dispersion bactérienne durant l’application pour s’assurer d’une couverture suffisante de la zone contaminée.
  • Mettre en œuvre un plan de surveillance à long terme pour faire en sorte que l’on se dirige vers les buts de l’assainissement. Si les résultats de la surveillance indiquent que les buts de l’assainissement ne sont pas atteints, il peut être nécessaire de réappliquer des colonies bactériennes ou de passer à des techniques de biostimulation.

Surveillance à long terme pour la biostimulati

Analyses recommandées dans le cadre d’une caractérisation détaillée

Analyses biologiques

  • Le dénombrement de la population bactérienne hétérotrophe totale et de la population bactérienne spécifique (selon le ou les contaminants d’intérêt)
  • Biodisponibilité des contaminants

Analyses chimiques

  • pH
  • Le potentiel d'oxydoréduction (Eh)
  • Le contenu en carbone organique
  • La teneur en matière organique
  • La concentration de l'eau en sel dissous
  • La concentration des contaminants présents dans les phases :
    • adsorbées
    • dissoutes
    • libres
  • La concentration des nutriments incluant :
    • l'azote ammoniacal
    • l'azote total Kjeldahl
    • les nitrates
    • les nitrites
    • le phosphore total

Analyses physiques

  • La température
  • L'analyse granulométrique
  • Les caractéristiques physiques du contaminant incluent :
    • la viscosité
    • la densité
    • la solibilité
    • la pression de la vapeur
  • L'évaluation biologiques et des facteurs écologiques
  • Caractérisation des sédiments et de l’eau interstitielle

Essais recommandés dans le cadre d’une caractérisation détaillée

Essais biologiques

  • Essai de minéralisation en microcosmes

Essais chimiques

  • Évaluation de la demande en oxydants chimiques

Remarque :

Un essai à petite échelle sur le terrain est requis afin de déterminer l'efficacité de la technologie ainsi que le design adapté aux conditions spécifiques du site contaminé (temps de résidence, débit de pompage, nécessité d'un prétraitement).

Autre information recommandée pour une caractérisation détaillée

Phase II

  • La profondeur et l'étendue de la contamination
  • La présence de récepteurs :
    • la présence de récepteurs potentiels
    • la présence d'infrastructures de surface et souterraines
    • le risque de migration hors site
  • Les conditions climatiques régionales (précipitations, température, etc.)
  • La caractérisation des conditions hydrodynamiques incluent :
    • la courantométrie
    • l'effet des vagues
    • la stabilité du lit
    • etc.
  • La caractérisation physico-chimique des sédiments et de l’eau interstitielle
  • La bathymétrie
  • Évaluation détaillée des conditions biologiques et des facteurs écologiques
  • Caractérisation de l’utilisation actuelle et projetée de l’eau de surface et du plan d’eau en général (incluant le tirant d’eau nécessaire pour les bateaux)

Applications

La biodégradation peut être considérée comme une option d’assainissement appropriée dans les circonstances suivantes :

  • Les contaminants préoccupants ne sont pas hautement mobiles et sont absorbés dans la phase solide ou dissous dans l’eau interstitielle ; ils peuvent être biodégradés dans des conditions aérobie ou anaérobie. La biodégradation des HAP dans des conditions anaérobie n’a été démontrée que pour les composés affichant un faible poids moléculaire, comme le naphtalène, les méthylnaphtalènes, le phénanthrène, le fluorène et le fluoranthène.
  • La contamination de surface est relativement uniforme (c.-à-d. absence d’emplacements distincts affichant une forte contamination).
  • Les sédiments sont stables, affichent de faibles taux d’érosion et une résistance élevée au cisaillement (capacité des sédiments de résister à une anomalie de déplacement) et sont capables de soutenir l’application du modificateur. Ils sont situés dans des environnements à faible énergie, où des courants forts et l’action des vagues ne suscitent pas de préoccupations au chapitre de la remise en suspension durant l’application.
  • La profondeur de l’eau ne doit pas être si grande qu’elle empêche l’établissement du modificateur. La profondeur optimale varie selon les caractéristiques de l’amendement et la poussée hydrostatique, mais on peut présumer qu’elle est semblable à celle où l’on réalise le recouvrement des sédiments (moins de 15 mètres pour le matériel non flottant). La stabilité de la pente des sédiments doit être suffisante pour soutenir l’application des amendements.
  • Les contaminants doivent être accessibles à la surface des sédiments pour appliquer un modificateur et se trouver à une distance raisonnable de la rive pour que l’application soit faisable et rentable. Si les contaminants se trouvent sous la surface des sédiments, la profondeur de la contamination doit être suffisamment faible pour permettre le mélange mécanique des amendements à partir de la surface ou à l’intérieur de la zone de bioturbation (mélange des sédiments par les organismes benthiques à l’interface entre les sédiments et l’eau).
  • Les emplacements qui affichent une communauté benthique et microbienne saine supporteront mieux le recours à la biodégradation. Les organismes benthiques doivent comprendre ceux qui sont capables d’assurer la bioturbation et qui se mélangent naturellement aux amendements des sédiments.

Applications aux sites en milieu nordique

Tandis que la biodégradation se produit généralement plus rapidement dans des conditions plus chaudes, elle a également été observée dans des environnements arctiques. Parmi les techniques de biodégradation qui ont été appliquées dans des environnements du Nord figurent les suivantes :

Biodégradeurs modifiés (Roberg et al. 2007) – Les chercheurs ont utilisé une version modifiée pour les climats froids d’Inipol EAP 22, un agent de biodégradation bien connu, pour accroître le nombre de dégradeurs d’hydrocarbures et, donc, le taux d’élimination des hydrocarbures dans les sédiments intertidaux de l’Arctique.

Biodégradation améliorée (Horowitz et Atlas, 1977) – Un passage naturel de populations microbiennes vers des microorganismes tolérant l’essence au plomb a été observé après un déversement de pétrole dans un lac d’eau douce. La biodégradation a été améliorée en ajoutant des éléments nutritifs et en inoculant des bactéries, ce qui s’est traduit par la présence d’hydrocarbures résiduels significativement réduite.

Impact d’une salinité accrue sur la dégradation de pétrole brut (Sharma et Schiewer 2016). Cette étude a permis de montrer qu’une salinité accrue avait un impact positif sur la dégradation de pétrole brut dans les sédiments grâce à la formation améliorée d’agrégats de pétrole et de minéraux.

Type de traitement

Type de traitement
Type de traitementS’applique ou Ne s’applique pas
In situ
S’applique
Ex situ
S’applique
Biologique
S’applique
Chimique
S’applique
Contamination dissoute
S’applique
Contamination résiduelle
S’applique
Contrôle
Ne s’applique pas
Phase libre
Ne s’applique pas
Physique
Ne s’applique pas
Résorption
S’applique
Thermique
Ne s’applique pas

État de la technologie

État de la technologie
État de la technologieExiste ou N'existe pas
Démonstration
Existe
Commercialisation
Existe

Contaminants ciblés

Contaminants ciblés
Contaminants ciblésS'applique, Ne s'applique pas ou Avec restrictions
Biphényles polychlorés
Avec restrictions
Chlorobenzène
S'applique
Composés inorganiques non métalliques
Ne s'applique pas
Composés phénoliques
Avec restrictions
Explosifs
Avec restrictions
Hydrocarbures aliphatiques chlorés
S'applique
Hydrocarbures aromatiques monocycliques
Avec restrictions
Hydrocarbures aromatiques polycycliques
S'applique
Hydrocarbures pétroliers
S'applique
Métaux
Ne s'applique pas
Pesticides
Avec restrictions

Durée du traitement

Durée du traitement
Durée du traitementS’applique ou Ne s’applique pas
Moins de 1 an
Ne s’applique pas
1 à 3 ans
S’applique
3 à 5 ans
S’applique
Plus de 5 ans
S’applique

Remarques :

Les techniques de biodégradation en sont encore à la phase d’élaboration. Celles-ci font l’objet de très nombreuses études et sont traitées dans la documentation scientifique. Cependant, on dispose de peu d’examens techniques et d’études de cas.

La durée du traitement peut varier de une à plusieurs années, selon le type de contaminant, sa quantité, les conditions du site et les amendements/la technique utilisée. Après le traitement initial, une surveillance régulière est nécessaire pour démontrer que les niveaux de contaminants tendent vers l’atteinte des objectifs de l’assainissement au fil du temps. Des applications d’amendements supplémentaires peuvent se révéler nécessaires.

Considérations à long terme (à la suite des travaux d'assainissement)

En théorie, les traitements afférents à la biodégradation sont permanents s’ils entraînent une destruction complète des contaminants. Cependant, aucune étude de surveillance à long terme (30 à 50 ans) n’a été achevée jusqu’à présent.

Produits secondaires ou métabolites

Dans la plupart des cas, les sous-produits de la biodégradation sont l’eau, le dioxyde de carbone et, dans le cas des composés chlorés, le chlore inorganique. Cependant, dans les cas d’absence d’activité catabolique bactérienne, on peut observer une dégradation incomplète de la molécule cible. Par exemple, la biodégradation incomplète de certains BPC (les dihydrodiols et les dihydroxybiphényles) peut mener à la production de composés issus de la dégradation qui présentent une toxicité significativement supérieure pour les bactéries, même au cours de périodes d’incubation brèves. Le trichloroéthène et le perchloroéthène mènent à la production de dichloroéthène, et la biodégradation incomplète de ce dernier composé peut mener à la formation de chloroéthène, lequel affiche une toxicité plus importante que les composés parents.

L’ajout d’amendements et l’activité biologique accrue peuvent mener à des changements dans les conditions géochimiques à l’intérieur des sédiments, par exemple, un changement de pH. Ces changements peuvent se traduire par une biodisponibilité accrue et par la mobilisation de certains métaux et d’autres contaminants.

Les agents de surface peuvent accroître la solubilité des contaminants, leur permettant d’être davantage disponibles pour l’absorption microbienne. On doit faire preuve de prudence dans l’utilisation des agents de surface pour veiller à ce qu’ils n’inhibent pas la biodégradation, ce qui peut se produire si l’agent en question est toxique pour les bactéries indigènes ou s’il y a une compétition pour l’utilisation du substrat (Liu et al. 2001).

Limitations et effets indésirables de la technologie

  • La technologie ne convient pas :
    • aux contaminants inorganiques comme les métaux ou les contaminants en phase libre ;
    • dans les eaux profondes ou dans les environnements caractérisés par une énergie élevée ;
    • sur les sites où se trouve une infrastructure marine et côtière qui rend difficile l’accès aux sédiments et qui permet de répartir de façon égale les éléments nutritifs, les microorganismes ou autres amendements.
  • Les HAP pyrogéniques (dérivés d’une combustion incomplète) sont plus difficiles à biodégrader que les HAP pétrogéniques (dérivés du pétrole brut et de ses produits raffinés) (Lei et al. 2005).
  • Il est difficile de prévoir le comportement des microorganismes en ce qui concerne le niveau et le taux de la biodégradation atteignables des contaminants. Par exemple, le taux de biodégradation des BPC peut être plus lent par un facteur de plusieurs ordres de grandeur in situ qu’en laboratoire en raison du manque d’un ou de plusieurs éléments nutritifs essentiels, du métabolisme préférentiel d’autres substrats qui se dégradent plus facilement ou de la présence de prédateurs microbiens ou de toxines (Agarwal et al. 2007).
  • La biodégradation peut exiger des périodes étendues selon le niveau de contamination, les contaminants présents, la biodisponibilité des contaminants, le type de sédiments, la température et d’autres facteurs.
  • Il existe peu d’examens techniques et d’études de cas à titre d’exemples de projets de biodégradation couronnés de succès. L’efficacité de la biostimulation a été démontrée en situation réelle, mais jusqu’à présent, la bioaugmentation ne s’est montrée efficace que dans des conditions de laboratoire. L’absence de projets de bioaugmentation à vaste échelle réalisés peut limiter l’acceptation, par le public, de la biodégradation comme option d’assainissement.

Répercussions négatives

  • Comme la contamination demeure en place, la libération de contaminants dans la subsurface représente une source de préoccupation. Les activités futures à réaliser sur le site (p. ex. construction) ou les phénomènes météorologiques extrêmes (p. ex. inondations) peuvent aboutir à la libération de contaminants dans l’étendue d’eau.
  • Les conditions géochimiques peuvent être modifiées par la biodégradation chimique ; par exemple, une activité biologique accrue peut mener à une biodisponibilité et une mobilisation accrues de certains métaux, ce qui augmente la toxicité directe des sédiments. La biodégradation peut aussi engendrer des produits qui sont plus toxiques que les composés parents.
  • L’injection d’amendements dans les sédiments peut réduire la résistance au cisaillement et la stabilité des sédiments, limitant ainsi les utilisations futures du site.

Technologies complémentaires améliorant l’efficacité du traitement

  • La biodégradation peut être utilisée en combinaison avec d’autres techniques in situ, comme le dragage, l’excavation ou le recouvrement, pour réduire encore davantage la disponibilité des contaminants.
  • Des amendements peuvent également être intégrés aux conceptions de recouvrement pour stimuler la biodégradation au cours d’un processus d’assainissement in situ actif des sédiments contaminés.
  • La biodégradation peut aussi être utilisée comme un traitement secondaire pour dégrader les contaminants résiduels demeurant dans les sédiments après un dragage de l’environnement.
  • Une étude a montré que l’association entre des techniques de biodégradation et un processus électrocinétique permettait une meilleure biodisponibilité et, ainsi, l’enlèvement des esters phtaliques dans les sédiments d’une rivière (Yang et al. 2015).

Traitements secondaires requis

Aucun traitement secondaire n’est requis si les concentrations cibles du contaminant sont atteintes.

Exemples d'application

University of Alaska Fairbanks, 2015. Biodegradation and Transport of Crude Oil in Sand and Gravel Beaches of Arctic Alaska.
http://www.boem.gov/BOEM-2015-041/

Environnement Canada, 1995. In Situ Treatment of Hamilton Harbour Sediment. Injection of Calcium Nitrate and Nutrients to Degrade Organic Compounds (PAHs) within Freshwater Sediments.
http://link.springer.com/article/10.1007%2FBF00116654

Performance

Le rendement des systèmes de biodégradation dans les sédiments, tel que consigné dans la documentation durant les essais pilotes ou les projets d’assainissement, peut atteindre jusqu’à 90 % de réduction des concentrations de sulfure, et une réduction de 50 à 80 % des concentrations d’HAP, d’hydrocarbures pétroliers et de BTEX. La déchloration des BPC ou des hydrocarbures halogénés en laboratoire a démontré qu’il est possible d’éliminer tous les contaminants. Il est important de noter que l’atteinte d’un tel niveau de biodégradation in situ est hautement improbable en raison de l’hétérogénéité intrinsèque des sédiments et de la difficulté qu’il y a à contrôler tous les paramètres, comme cela est possible en laboratoire. L’efficacité de la biodégradation peut être compromise par l’advection dans les eaux souterraines et l’action des marées, qui peuvent transporter des sédiments et des amendements à l’extérieur de la zone de traitement. Cependant, les résultats obtenus en laboratoire démontrent les possibilités de la technologie, qui peut être exploitée à l’avenir grâce à une meilleure compréhension et à un meilleur contrôle des processus.

Mesures pour améliorer la durabilité de la technologie et/ou favoriser l’assainissement écologique

La biodégradation est l’une des technologies in situ les plus durables et engendre moins d’impacts environnementaux que des options d’assainissement plus invasives, comme le dragage ou l’excavation. La durabilité et le succès global peuvent être améliorés en élaborant un plan propre au site qui permet de réduire la consommation d’énergie, de matières et d’eau, de réduire au minimum les émissions atmosphériques nocives et la production de déchets, et de protéger la santé humaine et les écosystèmes durant la surveillance. Par exemple, dans la mesure du possible, il convient :

  • recourir aux services et aux fournisseurs de services locaux ;
  • d’employer des mécanismes de contrôle institutionnels appropriés pour réduire au minimum les risques pour la santé humaine et le déplacement de matières indigènes ;
  • de mettre en œuvre des méthodes durables de surveillance sur place, comme les dispositifs d’échantillonnage passif, les techniques analytiques sur place et la télémétrie ou la collecte de données à distance ;
  • de respecter les restrictions temporelles propres au site pour la gestion et la protection du poisson et de son habitat.

Impacts potentiels de l'application de la technologie sur la santé humaine

Les traitements afférents à la biodégradation peuvent aboutir à un changement des conditions géochimiques, qui peut toucher à la fois les contaminants ciblés et les contaminants non ciblés. Lorsque l’on place des amendements, la couche supérieure des sédiments devient recouverte. Cette couverture peut modifier l’accès aux habitats benthiques et l’apport de nourriture, ainsi qu’entraîner la mort de certains organismes. Certains amendements peuvent devenir en suspension dans la colonne d’eau, modifiant les propriétés chimiques de l’eau et devenant susceptibles d’être absorbés par des microorganismes aquatiques. Les impacts sur la santé humaine qui peuvent survenir durant le traitement ou les activités de surveillance sont présentés dans le tableau ci-après.

Grandes voies d’exposition et santé humaine


Déclencheurs des voies d’exposition (étapes de l’assainissement) Milieu de résidence ou de transport Voies d’exposition du public (sur place et hors site) Surveillance, niveaux de mesures et démarches d’atténuation
Traitement in situ Amendements (p. ex. éléments nutritifs, microbes) Contact avec la peau, inhalation de particules et rejets gazeux, ingestion accidentelle Sélection d’amendements bénins, lorsque cela est possible. Éducation du personnel concernant la sécurité et fourniture d’un équipement de protection individuel approprié et de matériel de protection (p. ex. absorbants carrés), au besoin. Suivi des mesures en place pour l’entreposage et la manipulation en toute sécurité afin de réduire au minimum l’exposition, tel que l’énoncent les fiches techniques sur la sécurité du matériel.
Surveillance Activité microbienne accrue, causant potentiellement des changements dans les concentrations de produits chimiques et des hausses de la température Contact physique au cours d’activités récréatives Des mécanismes de contrôle institutionnels peuvent être nécessaires si l’on veut empêcher le public d’accéder à la zone durant les travaux d’assainissement actif.

Références

Auteur et mise à jour

Fiche rédigée par : Bruno Vallée M.Sc, LVM inc.

Dernière mise à jour par : Bruno Vallée, M.SC. (1), Sharilyn Hoobin, M.Sc. (2) and Ashley Hosier, Ing. (2), LVM Inc. (1) et Royal military college royal (2), respectivement

Date de mise à jour : 24 novembre 2016

Version :
1.2.4