Fiche descriptive : Phytoremédiation des composés inorganiques

De : Services publics et Approvisionnement Canada

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Description

La phytoremédiation consiste en l’utilisation de plantes pour réhabiliter ou contenir des contaminants dans différents média tels que le sol, les boues, les sédiments, l’eau souterraine, l’eau de surface ou l’eau usée. Pour ce faire, plusieurs mécanismes peuvent être utilisés dépendamment du type de contaminant et de médium contaminé. Selon les conditions du site, la phytoremédiation peut être une technique efficace et économiquement avantageuse pour le traitement de contaminants inorganiques et biodisponibles. Cependant, cette technique requiert une superficie considérable et des durées de traitement relativement longues.

La phytoremédiation des composés inorganiques fait intervenir trois mécanismes : la phytoextraction (aussi appelée phytoaccumulation), la rhizofiltration et la phytostabilisation (phytoséquestration).

Par la phytoextraction ou phytoaccumulation, les métaux présents dans le sol sont absorbés par les racines, puis il y a translocation de ceux-ci vers les tissus des parties aériennes de la plante où ils s’y accumuleront. Ces contaminants ne sont pas dégradés, mais persistent plutôt dans les racines et/ou au niveau des parties aériennes. Une fois récoltées, les plantes contenant des contaminants inorganiques doivent être disposées dans un endroit sécuritaire et approprié. Elles peuvent également être incinérées ou compostées afin de recycler les métaux. Si les plantes sont incinérées, la cendre produite est considérée comme une matière dangereuse et doit être disposée en conséquence. L’accumulation des métaux dans les tissus de la plante permet ainsi de réduire les quantités de matière contaminée à gérer, comparativement à la masse de sol contaminé qu’il faudrait gérer en procédant par une méthode de traitement impliquant l’excavation des sols contaminés. Les métaux facilement biodisponibles pour l’absorption par les plantes incluent le cadmium, le nickel, le zinc, l’arsenic, le sélénium et le cuivre des méthodes conventionnelles de traitement ex situ des sols. Les métaux modérément biodisponibles incluent le cobalt, le manganèse et le fer.

Lors du processus de rhizofiltration, les contaminants inorganiques sont soit adsorbés ou précipités sur les racines des plantes ou absorbés dans les racines. La rhizofiltration, à la différence de la phytoaccumulation, s’applique au traitement de contaminants dissous dans l’eau de surface, l’eau souterraine ou bien les eaux usées. Les racines des plantes sont récoltées une fois saturées de contaminants. Puisque toutes les réactions impliquent les racines, il est important de sélectionner une espèce ayant un système racinaire étendu et à croissance rapide afin de maximiser la surface de contact entre les contaminants et la plante. La rhizofiltration peut être utilisée comme moyen ex situ de traiter l’eau souterraine en utilisant celle-ci comme eau d’irrigation pour les plantes à l’intérieur d’une serre.

La phytostabilisation quant à elle se caractérise par l’immobilisation des contaminants dans le sol et dans l’eau souterraine par leur adsorption sur les racines ou leur précipitation dans la zone racinaire (rhizosphère) des plantes. Ce mécanisme est utilisé pour réduire la mobilité des contaminants et empêcher leur migration ce qui a également pour effet d’empêcher leur entrée dans la chaîne alimentaire.

Liens Internet (en anglais) :

Mise en œuvre de la technologie

Le défi premier de la phytoremédiation est le choix de plantes appropriées compte tenu de la nature des contaminants, les conditions climatiques et les propriétés du sol et de l’eau souterraine. Un essai pilote peut être nécessaire afin de vérifier l’efficacité des plantes sélectionnées. Un autre aspect à considérer est l’impact écologique de l’introduction d’une nouvelle espèce végétale dans un environnement potentiellement sensible.

Les projets peuvent inclure :

  • Des restrictions d’accès au site à l’aide de clôtures et des panneaux ;
  • Une caractérisation de site détaillée comprenant les conditions climatiques et la profondeur de la contamination, un inventaire de la végétation présente et la prise en considération de l’échéancier de réhabilitation ;
  • L’examen des études et des bases de données existantes pour la sélection des végétaux ;
  • Une étude en laboratoire ou un essai pilote en utilisant les végétaux choisis ;
    • Conception à pleine échelle et mise en œuvre :
    • Dessins et cartes des aménagements finaux ;
    • Préparation du sol (labourage, fertilisation et plantation) ;
    • Planification du système d’irrigation. Un approvisionnement en eau peut être requis sur le site ou à proximité dépendamment des besoins des plantes et des conditions climatiques ;
    • Dispositifs de suivi/puits ;
  • Entretien du site :
    • Irrigation et fertilisation
    • Contrôle des mauvaises herbes et des ravageurs
    • Le suivi de la croissance et de la performance de réhabilitation :
      • Échantillonnage et analyse du sol et de l’eau souterraine
      • Échantillonnage et analyse des tissus végétaux
      • Tonte, taille, récolte et manutention et disposition appropriées du matériel végétal

Pour les sites à superficie importante, de l’équipement agricole et/ou spécialisé peut être nécessaire pour l’installation et l’entretien.

Matériaux et entreposage

Les besoins de stockage de matériaux sont assez minimes.

  • Semences ou semis de plantes/arbres ;
  • Engrais et autres amendements
  • Eau pour irrigation : peut être entreposée sur le site si l’approvisionnement n’est pas disponible au site. Dépendamment de la taille du projet et du climat, de grandes quantités d’eau peuvent devoir être requises.

Résidus et rejets

Les résidus végétaux après la récolte doivent être manipulés, entreposés et éliminés de manière appropriée. Si les concentrations de contaminants dans les tissus végétaux excèdent les critères applicables, le matériel végétal taillé ou la litière devront être traités comme des déchets dangereux et être disposés dans un site de disposition approprié. L’incinération ou le compostage peut être considéré pour réduire le volume et la masse de matériel qui devra être géré.

Si des engrais ou autres amendements sont utilisés, le potentiel de contamination de l’eau de ruissellement de surface ou de l’eau souterraine par les amendements doit être considéré dans la conception du projet. L’utilisation excessive d’engrais ou d’amendements peut se traduire par des changements de pH ou la création de composés organiques métalliques solubles pouvant entraîner la mobilisation de contaminants.

Analyses recommandées dans le cadre d’une caractérisation détaillée

Analyses chimiques

  • pH
  • La teneur en matière organique
  • La concentration des métaux
  • La spéciation des métaux
  • L'extraction séquentielle de Tessier pour les métaux
  • La concentration des contaminants présents dans les phases :
    • adsorbées
    • dissoutes
    • libres
  • La concentration des nutriments incluant :
    • l'azote ammoniacal
    • l'azote total Kjeldahl
    • les nitrates
    • les nitrites
    • le phosphore total
  • La salinité/conductivité

Analyses physiques

  • La teneur en eau du sol
  • L'analyse granulométrique
  • L'évaluation biologiques et des facteurs écologiques

Essais recommandés dans le cadre d’une caractérisation détaillée

Essais biologiques

  • Essai de toxicité – Germination
  • Essai de toxicité – Élongation des racines
  • Essais en serre

Autre information recommandée pour une caractérisation détaillée

Phase II

  • La profondeur et l'étendue de la contamination

Phase III

  • La stratigraphie du sol
  • Une modélisation hydrogéologique

Remarques :

Un marais filtrant peut nécessiter une surface considérable selon les concentrations en contaminant et le volume d’eau. Le site devrait aussi être relativement plat.

D’importantes concentrations de certains contaminants, même temporairement, peuvent affecter le système à long terme.

Applications

  • Permet de traiter la contamination inorganique située dans le sol, les sédiments, l’eau de surface et l’eau souterraine ;
  • La contamination résiduelle doit être située près de la surface (si l’eau contaminée se situe en profondeur, celle-ci peut cependant être pompée et des plantes peuvent être utilisées pour la traiter) ;
  • S’applique aux sites où les concentrations en contaminants sont de moyennes à faibles ;
  • Peut être utilisé sur de vastes superficies

Applications aux sites en milieu nordique

Lors du choix des végétaux, il faut tenir compte de leur croissance dans des conditions climatiques particulières comme le froid et les courtes saisons de croissance en milieu nordique. La sensibilité écologique des environnements nordiques et éloignés doit aussi être considérée lors de l’évaluation de l’utilisation de la phytoremédiation, particulièrement si l’utilisation d’espèces non indigènes est prévue. Il faut de plus considérer que cette technique peut attirer les oiseaux et autres animaux qui pourraient être nuisibles à certains sites, par exemple au milieu aéroportuaire. L’entretien et l’irrigation peuvent être difficiles dans certaines régions éloignées. Les espèces devraient être choisies en favorisant des besoins en entretien et en irrigation minimes.

Type de traitement

Type de traitement
Type de traitementS’applique ou Ne s’applique pas
In situ
S’applique
Ex situ
S’applique
Biologique
S’applique
Chimique
S’applique
Contamination dissoute
S’applique
Contamination résiduelle
S’applique
Contrôle
S’applique
Phase libre
Ne s’applique pas
Physique
S’applique
Résorption
S’applique
Thermique
Ne s’applique pas

État de la technologie

État de la technologie
État de la technologieExiste ou N'existe pas
Démonstration
N'existe pas
Commercialisation
Existe

Contaminants ciblés

Contaminants ciblés
Contaminants ciblésS'applique, Ne s'applique pas ou Avec restrictions
Biphényles polychlorés
Ne s'applique pas
Chlorobenzène
Ne s'applique pas
Composés inorganiques non métalliques
S'applique
Composés phénoliques
Ne s'applique pas
Explosifs
Ne s'applique pas
Hydrocarbures aliphatiques chlorés
Ne s'applique pas
Hydrocarbures aromatiques monocycliques
Ne s'applique pas
Hydrocarbures aromatiques polycycliques
Ne s'applique pas
Hydrocarbures pétroliers
Ne s'applique pas
Métaux
S'applique
Pesticides
Ne s'applique pas

Durée du traitement

Durée du traitement
Durée du traitementS’applique ou Ne s’applique pas
Moins de 1 an
Ne s’applique pas
1 à 3 ans
Ne s’applique pas
3 à 5 ans
Ne s’applique pas
Plus de 5 ans
S’applique

Considérations à long terme (à la suite des travaux d'assainissement)

En cas de phytoaccumulation de contaminants dans les racines ou les tissus des végétaux, ou en cas de sorption aux racines des végétaux par le biais de la rhizofiltration, les résidus végétaux peuvent devoir être traités en conséquence.

Produits secondaires ou métabolites

La phytoremédiation des composés inorganiques en phase résiduelle ne génère pas de produits secondaires ou de métabolites.

Limitations et effets indésirables de la technologie

  • La profondeur de la contamination doit être limitée puisque la zone de traitement est déterminée par la profondeur de pénétration des racines dans le sol (moins d’un [1] mètre de la surface pour le sol et moins de trois [3] mètres pour le traitement in situ de l’eau souterraine). L’utilisation d’arbres permet le traitement de contamination située plus en profondeur ;
  • Le temps de traitement est relativement long, s’effectuant sur plusieurs années ;
  • Une concentration de contaminants élevée peut avoir un effet toxique sur les plantes ;
  • Un pourcentage trop faible de matière organique ;
  • La croissance des végétaux est limitée par la situation géographique (climat/saison) et les caractéristiques du sol ;
  • La présence de bâtiments ou d’infrastructures souterraines peut interférer avec la plantation ou l’empêcher et ainsi exclure cette technologie des options à envisager ;
  • Dans certaines conditions la biodisponibilité peut grandement freiner l’application de la technologie
  • Durant le traitement il faut limiter l’accès au site par les humains et les animaux. Le potentiel de bioaccumulation dans la chaîne alimentaire doit être considérer lors de l’évaluation du contrôle de l’accès de la faune au site ;
  • Peut exiger une grande surface vierge sur laquelle la topographie permet de cultiver l’espèce végétale sélectionnée ;
  • L’analyse des tissus végétaux peut être nécessaire avant la disposition de tout matériel potentiellement contaminé ;
  • Cette technologie peut seulement être appliquée aux sites sur lesquels le risque généré est faible pour la santé humaine et de l’environnement, par exemple où les longues périodes de réhabilitation sont possibles et où la bioconcentration de contaminants toxiques dans les plantes ne présente pas un facteur de risque important ;
  • L’irrigation peut affecter l’écoulement de l’eau souterraine et le déplacement hydraulique ;
  • Les pratiques utilisées et l’utilisation d’amendements peuvent mener à la création de nouvelles voies métaboliques pouvant affecter la mobilité des contaminants ;
  • Les résidus végétaux contenant des contaminants inorganiques doivent être convenablement stockés pour être ensuite éliminés dans un lieu sécuritaire. Une évaluation des risques peut être nécessaire avant d’éliminer des végétaux contaminés.

Technologies complémentaires améliorant l’efficacité du traitement

  • L’ajout d’agents chélateurs peut augmenter la biodisponibilité de certains métaux (par exemple le plomb)
  • L’ajout d’acide citrique et de nitrate d’ammonium peut augmenter la biodisponibilité de l’uranium et du radio-césium 137 respectivement.

Traitements secondaires requis

  • Un programme de gestion et d’élimination des résidus végétaux doit être mis en place. Si les concentrations de contaminants dans les tissus végétaux excèdent les critères applicables, le matériel végétal taillé ou la litière devront être traités comme des déchets dangereux et être disposés dans un site de disposition approprié. L’incinération ou le compostage peut être considéré pour réduire le volume et la masse de matériel qui devra être géré.

Exemples d'application

La phytoremédiation des composés inorganiques est une technique qui a démontré son efficacité sur plusieurs sites.

Le site suivant fournit des exemples d’application :

Performance

Le temps nécessaire à la restauration d’un site par phytoremédiation est très variable et est fonction à la fois du contaminant, des plantes sélectionnées, de la population et l’activité bactérienne dans la rhizosphère ainsi que des propriétés physico-chimiques du milieu.

Mesures pour améliorer la durabilité de la technologie et/ou favoriser l’assainissement écologique

  • Optimisation des apports d’engrais et d’eau en fonction des besoins particuliers des végétaux, des études portant sur les éléments nutritifs du sol et des systèmes d’irrigation goutte à goutte.
  • Examen des moyens permettant d’optimiser les programmes d’entretien et de surveillance comme les systèmes d’irrigation automatiques jumelés à la télémétrie (par exemple, l’humidité du sol).
  • Faire preuve de vigilance en matière de biosécurité en prenant les mesures de protection appropriées, et en respectant toutes les règles d’utilisation des végétaux génétiquement modifiés (transgéniques), notamment en ce qui a trait aux méthodes de culture, à l’enracinement, à la floraison, etc.

Impacts potentiels de l'application de la technologie sur la santé humaine

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Références

Auteur et mise à jour

Fiche rédigée par : Magalie Turgeon, Conseil national de recherches

Mise à jour par : Jennifer Holdner, M.Sc., Travaux publics et Services gouvernementaux Canada

Date de mise à jour : 1 mars 2015

Dernière mise à jour par : Marianne Brien, P.Eng., Christian Gosselin, P.Eng., M.Eng., Golder Associés Ltée

Date de mise à jour : 31 mars 2018

Version :
1.2.4